Franà§ois-Charles écrit de Paris à son frère Jacques-Philippe Saveuse de Beaujeu. Il lui annonce qu’il tente en vain de lui faire passer des lettres depuis six ans et il souhaite que cette lettre parvienne à bon port. Il annonce à son frère qu’un de ses amis lui a appris au cours de l’année précédente que leur oncle Joseph-Dominique-Emmanuel Le Moyne de Longueuil était décédé, laissant une fortune considérable dont ils sont les seuls héritiers. Il demande à son frère de l’éclairer sur la nature de cet héritage et sur la procédure à observer pour que cet argent lui parvienne en Angleterre.
Activités économiques, organisation sociale, réalités politiques
6eme
Paris ce 1r Xbre 1808
C’est inutillement, mon ami, que depuis six ans, je
cherche le moyen de te faire parvenir de mes nouvelles[1].
Je désire bien de toutes faà§ons, que celui que j’employe
aujourd’huy, me soit plus favorable et que tu saches
enfin quelle est ma pénible éxistence. Je n’entrerai cependant
dans aucun détail, et me bornerai à te dire qu’il en fut
jamais de plus affreuse.
J’appris il y a un an, par un de tes amis[2] ( qui
depuis peu t’avoit quitté ) qu’il étoit chargé par toi
de s’informer de mon sort. à€ cette époque, je fis passer
à cette màªme personne, plusieurs lettres que je t’écrivois;
j’ignore ce qu’elle est devenue ainsi que mon envoi.
J’ai s໠par des voies indirectes la perte que nous
avions faite de notre oncle, Mr de Longueuà¯l, qu’il
laissoit une fortune considérable dont nous sommes les
seuls héritiers[3]. Je me plais a croire que mes intéràªts sont
entre tes mains, et que tu voudras bien en me faisant passer
quelques secours, m’envoyer, le plutot possible, les renseignemens
qui ont trait à cet héritage[4], et les moyens que je dois
employer, pour le faire parvenir en Angleterre. Je pense (
sauf un meilleur avis ) que Mr Brickwood[5] pourroit m’àªtre
plus utile qu’aucun autre négociant, ayant surtout
l’avantage d’en àªtre connu et d’avoir déjà éprouvé
l’excellence de son à¢me.
Il fut un tems plus heureux, mon cher Saveuse, oà¹
j’étois pràªt a faire pour toi, ce qu’aujourd’huy je
réclà¢me de ton amitié, et tes sentimens ne me laissent
aucun doute; sur la bienveillance avec la quelle tu dois
accueillir ma demande.
Mon fils me charge de t’offrir ainsi
qu’au chevalier, l’assurance de sa respectueuse amitié.
Il est au service de son paà¯s, depuis deux ans, et suis
toujours on ne peut plus satisfait de sa conduite[6].
Adieu, mon ami, un jour viendra ( peut àªtre ) oà¹
notre correspondance moins intérompue saura dumoins
alléger les peines de notre séparation. Ne m’oublie pas
auprès de notre frere a qui cette lettre est commune avec
toi et croyez l’un et l’autre à la tendre et inviolable amitié
de votre infortuné frere.
De Beaujeu
P.S. Je t’écris six lettres toutes numérotées et contenant
le màªme style[7].
Voila mon adresse.
Chez Mr Périer rue des Marais St. Martin
No. 44 à€ Paris[8].
P03/A.244, Fonds De Beaujeu, Centre d'histoire La Presqu'à®le