29 février 1780 : Lettre de Doutreleau à  Joseph-Dominique-Emmanuel

Résumé du document

Jean Doutreleau, procureur franà§ais, écrit à  Joseph-Dominique-Emmanuel, son client au Canada. Il entretient celui-ci de ses finances, des articles qu'il lui a commandés, des détails à  régler pour la succession de Paul-Joseph, le père de JDE, et termine en donnant quelques nouvelles de France.

Mots clés

Activités économiques, organisation sociale

Transcription


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Lettre du 29 février 1780, Doutreleau à  Joseph-Dominique-Emmanuel

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M[onsieur] de Longueuil a Montreal

2e

Jay receu Monsieur vos deux lettres par dup[licata].
Je vous prie l’année prochaine de m’ecrire
par triplicata avec de l’encre un peu plus
noire, et les mettre si vous pouvés sur des
vaisseaux de guerres, car je crains que cette
année la mere ne soit couverte de vaisseaux
de guerre et de corsaires.

Je croi que vous faites bien de vous en tenir au
testament qu’a fait faire Mad[ame] Germain, et
que le S[ieur] Veron m’avoit marqué de luy envoyer
une cinquantaine d’ecus pour en avoir une
copie et qu’ils auroient p໠se faire faire
quelque present. Je croi qu’ils ont plus songé a
eux qu’a vous, car il est inconcevable que
joà¼issant de plus 3000# de rante et ne voyant
personne il ait depansé 2000# plus que son revenu
pendant que dans le temps ou les pansions ont
eté quatre sans sans etre payées il n’a emprunté
qu’environ 2000# elles avoient cessée d’etre payées
en 1767 ou 1768 jusques en 1771 ou 12. Elles ont eté toujou
regulierement payées tous les ans une &&& &&&
année et les autres en ariere et pend[ant] ce temps la il ne
me demandoit que tantot 400# ou 600# et encore


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Lettre du 29 février 1780, Doutreleau à  Joseph-Dominique-Emmanuel

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y a t’il 600# pour le voyage qu’il a fait a Paris
pour le proces de la baronie.

Le partage sera aisé a faire, mais il faut que
vous me marquiés si Mad[ame] Beaujeu consent a
payer sa part de ce que je luy ay payé, elle pouroit
demander de quelle part jay fait ses payements la
et n’y pas consentir pour sa part. Je vous prie de
me marquer ce qui en est et je ferois votre partage
sinon il faudroit le faire pardevant notaire ce qui
couteroit quelques fraix.

A la mort de tous les officiers qui ont des pansions
sur le Trezor Royal elles n’ont jamais etés payées
a eux ny a leurs heritiers qu’une année a la fois.
Vous aves encore 3 année a recevoir et une que
jay receu au mois de may dernier et en receveray
de màªme une le mois de may prochain et les deux
autres de màªme.

Je vous fait mon compliment d’avoir trouvé
un moulange car c’auroit eté un grand embaras
et vous auroit couté bien des fraix.

Il n’y a pas d’apparance que les affaires des
couronnes gueroyantes s’arrangent cette année.
Si elles s’arrangeoient l’année prochaine,


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Lettre du 29 février 1780, Doutreleau à  Joseph-Dominique-Emmanuel

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je vous enverroit tous ce que vous dezirés. Le plat
de bouilly les couverts a filets, mais dites moy ce que
vous voullés faire de cette caffetiere qui n’a pas de
pied et qui ne peut se tenir seule. Si vous voullés que
je la change pour une autre, vous me marquer[ay]
combien vous la voulés de tasses.

Jay ecry en Flandre pour scavoir combien coutes
le linge que vous me demandés c’est de la
qu’on les tire pour Paris, ce qui vous reviendera
meilleur marché qu’icy. Je les ay demandé a
[Rets Bleuf] quoy qu’on ne s’en serve pas icy
mais chacun a son goust.

Si nous avions la paix l’année prochaine, je
vous enveray tout ce que vous me demandés, et si
par hazard vous changiés d’avis sur quelque chose
vous me le marquerés. Mander moy ce que je
feray de la petite montre d’or, vous pouriés vous
en defaire plus avantageusement chez vous.
On en achette de pareilles icy a 6 louis tant
qu’on veut et on les vendt quatre ou
5 au plus.

Vous me parlés d’un bougeoir a 2 bobeches
on ne m’a envoyé qu’un boujor sans bobeches


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encore est’il tres ancien. Si vous en vouliés un
autre qui seroit bien joly. En troquant le reste
vous avés tiré sur moy une lettre de change a
4 mois de veà¼e qui etoit payable en avril et je
l’ay payé le 10 janvier et l’auroit payé devant
si on avoit mis l’acquit en me la presentant
l’année derniere. Je dis au porteur que je la
payeroit a l’echeance qui etoit prochain et ils l’ont fait
protester faute d’acceptation et jamais aucun &&
banquier ne m’a fait cela. Il etoit temps si a
l’echeance je ne l’eusse pas payé de la faire proteste.
Je suis charmé que Madame Germain vous ait
envoyé 541 pour la vante qu’elle a fait a l’Orient
et qui comme vous avés veà» avoient couté plus de
la moitié de cette somme en fraix de voiture et droits.
J’aurois desiré qu’elle eut vandu le linge
qui auroit peut etre eté vandu aussy cher que je
le vanderay icy et auroit epargne 18# de fraix.
Ce linge consiste en 84 serviettes tout ouvrés
que plain toutes en tres mauvais etat pleines
de trous de coupures de couteau. Jamais on n’y a
fait le moindre entretien. Il y en a 12 ouvrés invandables
3 napes 4 draps de maitre n’ayant pas receu
le cinquieme que jay demandé a Madame Germain
qui m’a dit qu’elle ne scavoit pas ce qu’il
etoit devenu heureusement qu’ils sont bien
vieux.


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Je n’ay pas trouvé de torchons ny tablier
ny nape de cuisine et on ne m’en a point
accusé aparament qu’ils n’en valloient pas
la peine. Je n’ay receu que 4 draps de
domestique, le 4e ayant servi a l’enterer
encore j’en ay veu un qui etoit fait avec des
bandes de toilles cousà¼es en travers.

Je vous debarasserés de tous ce vieux linge cette
esté. Les serviettes ouvrées font trembler tant
elles sont mauvaises. Elles ne sont bonnes qu’a
faire de la charpie et que je ne compte pas dans les 84.
Je vous envoye une lettre de change de 3000#
sur M[onsieur] Grant de Québec pour la vante que
je luy ay fait de tous les biens que M[onsieur] Marin
avoit en Canada qu’il ne luy avoit pas voulu
donner pour 6000# et comme il est vennu cette
esté a Paris il a mangé tout son argent et
devoit il m’est venu trouver, et comme je n’avis
pas les 6000# il a eté chez mon notaire qui luy
a dit que si je voulois etre caution il les feroit
pretter de sorte que je luy ay vandu suivant
la procuration que j’avois de M[onsieur] Marin Grant


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Je demeure depuis 4 ans rà¼e St-Pierre
au pont aux choux.

dattée du 25 [octobre] 1777 et suivant le contract de
vante que je luy ay passé le 17 [novembre] dernier. Je compte
qu’il la payera, je vous prie de la faire protester si par
hazard il ne la payoit pas, et de faire saisir entre ses main
la somme de 4284#4 qu’il a entre ses mains appartenants
a M Marin suivant le compte que M. Tachereau m’a
envoyé cette année que je n’ay pà» envoyer a M. Marin qui
est allé aux isles avec son regiment. Je vous prie de luy
faire presenter cette lettre 15 ou 20 jours apres que vous l’aurés
receu et cela ne vous empechera pas de tirer sur moy.

Il faut vous donner des nouvelles. Nous avons un controlleur
general des finances comme il n’y en a jamais eà». Il va
arranger le royaume comme il arrange sa maison et le Roy
y gagnera au moins 40 millions de rante. Il a commencé
par supprimer les intendants des finances qui etoient a la
tàªte des financiers, ensuite il a supprimés tous les trezorier
des guerres, de l’artillerie du genie des ponts et chaussée et en
general tous les trezoriers et controlleurs, et a mis a leur
place des regisseurs a qui il donne des des appointements
mediocre. Il vient de supprimer la moitié de la maison
du Roy, toutes les tables, le Roy et la Reine n’auront
plus qu’une table. On donnera au lieu de table a la moitié
des officiers restants leur argent a depanser, les bougies
la musique l’ecurie dont chaque cheval coutoit au Roy
10# par jour et qu’il fait entretenir et nourir pour
3# par jour. C’etoit une depradation affreuse il a suprimé
les intandants des menà¼s et les menà¼s qui etoit une
depradation affreuse, il vient de supprimer tous les
fermiers generaux et autres de 60. Il en garde 40
qui seront des regisseurs 30 000# chacun par an
et il fait tous cela gratis. Il est vray qu’il joà¼it de 200 000#
de rante.

<Il faut finir cette lettre en vous priant d’asseurer Madame de mes
respects et de luy souhaitée une bonne sancté ainsy qu’a vous et vous priant
d’etre persuadé des sentiments avec lesquels je suis votre
serviteur et ami.>


P03/H.087, Fonds De Beaujeu, Centre d'histoire La Presqu'à®le

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